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Y a t-il un âge limite pour pouvoir être traité pour un cancer?


En dehors de certaines formes de cancers propres à l’enfant ou à l’adulte jeune, la fréquence et l’incidence (= nombre de nouveaux cas/an) de cancers augmentent avec l’âge, elles sont globalement 11 fois supérieures après l’âge de 65 ans comparativement aux sujets plus jeunes.

Malgré cette augmentation et l’allongement de l’espérance de vie qui fait que la proportion de sujets âgées de plus de 80 ans dans la population augmente régulièrement en France, il existe encore relativement peu de données concernant l’efficacité et la tolérance des traitements des cancers chez les patients les plus âgés. Cela s’explique en grande partie par le fait que, les patients les plus âgés qui ont souvent de nombreuses comorbidités (= facteurs de risque cardiovasculaires et maladies chroniques) sont le plus souvent d’emblée exclus des essais thérapeutiques évaluant l’efficacité et la tolérance d’une chimiothérapie et/ou d’une immunothérapie.

L’âge chronologique ne peut pas à lui seul être considéré comme un marqueur de l’état de santé d’un patient atteint de cancer car il ne permet pas à lui seul de juger de son espérance de vie. Ainsi, un patient de 85 ans sans comorbidités peut espérer vivre en moyenne encore près de 8 ans contre 2,2 ans en moyenne s’il présente des comorbidités importantes et/ou ce que l’on appelle des "fragilités" gériatriques qui vont peuvent augmenter considérablement les risques de toxicité d’une chimiothérapie.

Chez les patients âgés, la prise de décision quand la mise en œuvre et le choix du traitement d’un cancer est donc de fait plus difficile. Pour aider à la décision, l’Institut National du Cancer (Inca) recommande systématiquement chez les patients de 70 ans et plus, le dépistage de la "fragilité gériatrique" et la réalisation d’une évaluation gériatrique approfondie (EGA) à l’aide d’échelles dédiées (VES613, G8) et validées avant la prise de décision du traitement.


L’onco-gériatrie est une discipline transversale en plein essor qui allie l’expertise de l’oncologue pour le diagnostic et les objectifs attendus du traitement et celle du gériatre pour la détection et la prise en compte des comorbidités et/ou fragilités (perte d’autonomie, dénutrition…) du patient. Il est bien démontré qu’une EGA préalable à toute décision thérapeutique permet de proposer des interventions sur les aspect nutritionnels, sociaux, fonctionnels et/ou d’optimisation de la prise en charge des comorbidités et d’adapter le type et/ou l’intensité du traitement du cancer chez trois quarts des patients parmi les plus âgés. Pour un cancer justifiant une chirurgie par exemple, cette approche permet de mieux anticiper d’éventuelles complications post-opératoires ; pour la radiothérapie dont la toxicité peut être accrue en fonction des sites à irradier, les modalités d’administration (dose totale, fractionnement, étalement des séances) peuvent être adaptées et il en de même pour les modalités d’une chimiothérapie. En ce qui concerne l’immunothérapie, les données dont on dispose chez les patients de plus de 65 ans montrent des taux d’efficacité et un profil de tolérance comparables à ceux des patients plus jeunes mais très peu d’études se sont pour le moment intéressées aux patients de plus de 75 ans et /ou avec de nombreuses fragilités.


En conclusion, il n’y a pas d’âge limite officiel pour limiter la prise en charge d’un cancer en France et cela s’explique par les grandes disparités d’état de santé entre individus dans ces tranches d’âge. Au-delà bien évidement du stade et du pronostic inhérents au type de cancer considéré qui doivent être prise en compte en regard de l’espérance de vie présumée du patient et de ses propres attentes, la décision de savoir s’il faut traiter et si oui comment, doit, pour les patients de plus de 70-75ans, reposer sur une évaluation onco-gériatrique préalable.

Rédaction : Pr Marc Michel, service de Médecine Interne – Immunologie Clinique, CHU Henri Mondor, APHP, Université Paris-Est Créteil.

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